Un Noir et des blancs
En ce mois de Novembre, il fait bien froid et la pêche est mauvaise. Il faut pourtant vivre. Le village de Mallsbury Crossing pense que Burroughs, le patron de la boutique où on trouve de tout, est plus que riche. Ses deux cabanes sont habitées par des noirs. Un matin, à sept heures, un Noir vient acheter un gallon de whisky, ça lui vide les poches. Plus tard, ils sont quelques uns dans la boutique, la parole fait dans son habituel. L'alcool, la politique, la fesse, rien n'a encore changé.
Kitty arrive et repart avec une bouteille. Ils lui refont sa vie, du bien jusqu'à aujourd'hui et Kitty est à plaindre.
Le type de New-York paie un coup. Le gallon de whisky est à Jim le Noir. L'alcool le retourne, il n'a qu'un seul cri : LA FEMME BLANCHE ! Une femme qui trainasse, Jim est derrière " Cours, cours la bête est en liberté ". Chez Kitty, on boit sec avant le petit déjeuner. Puis, elle prend la route. Dans pas longtemps un groupe de policiers l'entoure pour une seule raison. C'est sûrement un nègre qui l'a tuée.
Le lynchage est de mise. Le shérif embauche toute la ville. Le journal du coin est au courant. Un groupe démarre avec des chiens. Dans la milice il y a Al, un amant de Kitty. La tante Rebu habite dans une cabane, son fils, c'est Jim. Dans pas longtemps la milice trouve un Noir qui dort dans un grenier. Ah ! si on pouvaient le pendre tout de suite.
En face, dans la ville il y a des communistes, des ennemis qui défendent l'humain quel qu'il soit. On lui passe les menottes. Le shérif se présente aux élections. On commence dans les rues à crier après le nègre "A mort, à mort ! "
Il y a beaucoup de gens pour le lynchage et moins pour la mise à mort officielle. Al est pour la justice, sans oublier qu'avec Jim ils ont été élevés ensemble. La côte Est est de face avec les autres états américains, c'est un combat politique. Dans un groupe, un new-yorkais prend la parole. Il faut le pendre et mettre le feu, c'est à nous de le faire. Des femmes prennent position. C'est pour notre bien que les assassins nègres doivent être pendus. Les commerçants sont d'accord.
Un seul fait tout ce qu'il peut pour sauver Jim. Demain, il verra le plafond de la prison. L'alcool prend encore de la place. Pour le shérif, deux mots, nègre et enfer. Le grondement de la foule arrive à la prison. " Ils m'auront pas ! " La manif passe par les téléphones et se transforme en affaire politique, donc des coupables. Le capitalisme est accusé. Dans cette ville, certains ont besoin de révérend Baxbee, il est là et il accuse l'alcool de ce malheur. La foule arrive, le shérif pose son arme sur son bureau. Les femmes de la manif en veulent encore plus. Au pied de la prison, un seul mot "nègre ".
Une hache fracasse la porte. On l’emmène dans une grange à coups de pieds. Dans la grange, des clous, des couteaux. Le feu vient de l'extérieur. La foule hurle. Al n'est pas un lyncheur et pourtant il court.
Trois camions font du bruit, c'est la Garde Nationale, les armes à la main. Deux communistes font les espions. Pourquoi vous ne faites pas partie des lyncheurs ? Le ton monte. Les journalistes sont pris au colbac " Dehors vite ! "
Al raconte le lynchage à sa femme Perky, trop sans doute. Chez les lyncheurs, on se réjouit. Al Purvis le dit haut et fort : Fumiers de soldats. Un ordre "baïonnettes aux canons ! " Des deux côtés, on crie. Deux noirs le trouvent.
Dans le Maryland en 1930 un noir viole, massacre une blanche. La ville de Mallsbury Crossing descend dans la rue, pour eux le lynchage est la justice du peuple blanc. Plus haut, dans l'état du Maryland, on envoie des soldats, la "guerre" est bien proche. L’assassin est pendu à un arbre. Les soldats pensent avoir gagné. Un blanc entend bien continuer son travail avec la justice.
La Bête qui sommeille. Don Tracy. Gallimard Série Noire mai 2024. Traduction de Marcel Duhamel et Jacques-Laurent, révisée par Michael Belano. Préface inédite de Michael Bélano.