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Publié par blog813

Instants Chavirés
Une chronique de notre ami Michel Barouh
Épuisés lors de l'interrogatoire mené par un inspecteur de police, le «good cop, et son collègue «bad cop», « ils sont prêts à tout avouer, même l'inavouable ». Il est tard, le juge n'est pas là ; ils sont conduits au dépôt dans les caves du palais de justice. Dans la souricière, ils passent encore une nuit sans dormir dans la crasse et les mauvaises odeurs. Le lendemain matin. « Louons le juge, […], s’il apparaît et s’il nous signe les arrêts ». Le juge les reçoit enfin, « simple formalité en ce qui le concerne, leur lit du charabia », signe les écrous puis direction la Santé. 
Matricule 77529, l'auteur va partager la vie d'un groupe de 7 à 8 hommes dans 12 m², jour et nuit, pendant plusieurs mois.
Dans de courts textes, il raconte les premiers mois de son incarcération dans la cellule 317 du bloc B de la prison de la Santé.
Il ne s’agit pas d’un véritable journal, il n'y a aucun chapitre ce qui est surprenant en commençant la lecture. On s'y fait petit à petit. 
Cette succession, d'images fortes, de moments de tension, de complicité dans l’adversité, d’humour et parfois même de poésie, constitue les pièces d’un puzzle dont certaines pièces, des fragments de mémoire, auraient été égarées.
La précision des détails contraste avec le flou que les détenus, y compris l’auteur, maintiennent autour des raisons de leur présence en détention.
Les jours s’enchaînent, identiques, le temps s’écoule très lentement rythmé par l’attente. Celle du prochain rendez-vous chez le juge est oppressante.  Ne pas savoir à quel moment il signera la fin de l’instruction et fixera la date du procès est source d’espoir et d'inquiétude.
Malgré tout, il semble accepter son sort sans colère, ni désir de vengeance.
Dans ces « Instants Chavirés », Jean-Claude Le Coz, personnage assez mystérieux, a levé une partie du voile sur son séjour de primo-délinquant à la Santé.  Pourquoi a-t-il choisi ce mode d’écriture ? Pour ne pas tout révéler ?  
 
 
René Frégni qui a beaucoup écrit sur le sujet propose une belle préface. « Je suis entré dans le récit de Jean-Claude Lecoz comme on entre dans une forêt immense et inconnue, curieux, un peu hésitant. Un livre est comme une forêt, il faut aimer s’y perdre, errer, retrouver la lumière... Pourtant, cette forêt de béton, je la connais un peu... » Il conclut « Ce récit, ces émotions, ces doutes, ces traces de mémoire sont un chemin d’humanité ouvert vers l’avenir. Entre le bien et le mal, Jean-Claude Lecoz a choisi la vraie justice. Cette justice est toujours morale. »
 
4 ème de couverture.
Instant chaviré est le roman de la détention, telle que la découvre un jeune délinquant qui y fait « ses premiers pas » et nous raconte des « petites scènes de la vie ordinaire en prison ». Mises bout à bout ces scènes et leur cortège de seconds rôles truculents, décalés, menteurs, crapules ou naïfs, deviennent un récit aux forts accents de sincérité qui révèlent un personnage, ses erreurs et son histoire, sa quête également d’un acquittement illusoire. Le style est impressionniste, poétique, la réalité crue, parfois cocasse.
 Les histoires que s’inventent les détenus pour justifier leur présence derrière les barreaux, ou pour la supporter, oscillent entre fantasme, mensonge et triste réalité. La prison déshumanise, mais elle fait également ressortir toute l’humanité, bonne et mauvaise, de ceux qui s’en sont placés à la marge.
« Certaines traversées nous marquent pour toujours », écrit Jean-Claude Le Coz, qui après des débuts dans la vie sous le signe de la prison, a connu un acquittement tardif puis a consacré sa vie aux bateaux.
 
Michel 126
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