T’as de beaux yeux tu sais.
La marée est basse et la chasse n’est pas encore ouverte. Anatole s’y promène le fusil sur l’épaule.
Lucille vit dans une caravane. Elle a choisi l’empathie. Dans la région de Calais, il y avait du travail.
Des jumelles sont l’arme de Loïk, on y voit mieux les oiseaux. Il n’y a pas si longtemps, le paysage était à trois mètres.
La plage où ils vivent est tachée de sang depuis longtemps. De 1940, aux migrants africains.
Chacun de se découvrir. Qui les armes à la main ou le presque salopard, et la déçue d’un projet humanitaire.
Comme tout bord de mer, c’est la fin du monde ou le début d’un autre.
La baraque à frites, la bière par caisse et Mamie Crevette.
Dans un trio, il y en a un en trop. Lequel, laquelle voit les choses comme ça ?
Un flic débarque. Une histoire de blockhaus. Et Loïk là dedans, lui qui passe encore la moitié de son temps en prison. C’est la tête qui est en vrac.
Il y a de bons jours ! La bière, les oiseaux et les crevettes.
Même si la terre s’arrête là, la vie de tous les jours ne fait pas de cadeau.
Les fusils auront toujours la parole.
Le bord de mer serait presque en vacances. Chacun est là par hasard, la chasse, la misère, la prison. Fallait-il qu’ils se rencontrent ?
Difficile de faire autrement. Encore un pas et le monde change. C’est loin.
L’Horizon qui nous manque. Pascal Dessaint. Rivages Noir, septembre 2019