Coup de ♥ estival
Le coup de ♥ estival de Serge Breton a ceci de particulier qu'il concerne un roman paru en 1978. Et pourquoi non ?
Salut bien,
Le polar a son patrimoine, dont 813 est aussi le chantre. Or donc, retour sur une lecture récente d'un titre ancien:
Henry Archery, clergyman de son état, a des principes. Surtout lorsque son fils veut épouser la douce et parfaite Tess. Parfaite, vraiment? Son père n'a-t-il pas, seize années auparavant, été pendu pour le meurtre abject d'une vieille dame? Son sens de l'honneur, ainsi que la sombre appréhension de pernicieux gènes héréditaires, poussent Archery à se pencher sur la question. D'autant que la mère de Tess ne cesse d'affirmer à sa fille que son père n'est pas un assassin. Archery finit par se convaincre d'une erreur judiciaire… contre l'avis de l'inspecteur-Chef Wexford, dont c'était naguère la première enquête.
Il s'agit là du 2ème roman (sur 24 en tout) que Ruth Rendell a consacré à Wexford et son adjoint Burden. Ici, les deux policiers sont en retrait, presque des figurants. Le devant de la scène est occupé par Archery père et fils dans la quête désordonnée de leur vérité, multipliant les rencontres avec les acteurs et témoins de la tragédie du passé. Une autre mort sera leur tribut à payer…
Quitte à spoiler un brin (mais là n'est pas l'essentiel), Wexford n'a pas failli et bien conduit le vrai coupable sur le gibet. Le retournement final n'en est que plus roublard… et tellement logique.
En 1967, Ruth Rendell est à l'aube de sa carrière. Son goût prononcé pour les trames complexes et la psychologie fouillée des personnages s'y affirme déjà. De même que certains de ses thèmes favoris, tels les traumatismes liés à l'enfance (ici, les séquelles provoquées chez une fillette de cinq ans par la découverte du cadavre de la vieille dame assassinée). On pourra aussi s'émouvoir d'un soudain trouble sensoriel éprouvé par notre pasteur lors de son enquête. Sous la soutane, que l'exercice de son ministère ne lui fait d'ailleurs pas porter, ne bat donc pas seulement un cœur… Bon, je m'égare, à l'inverse de l'auteure, qui évite toute mièvrerie.
Jusqu'à sa mort en 2015, Ruth Rendell a été socialement et politiquent engagée. Longtemps députée travailliste, elle s'est notamment investie pour le droit des femmes et des enfants. Sans jamais sacrifier son art de l'intrigue et de la narration, ses romans reflètent ses convictions et dessinent un profil sociologique aigu de l'Angleterre de ces dernières décennies. Cette œuvre de jeunesse ne fait pas exception et, en dépit d'une traduction sans doute tronquée, captive aussi pour cela.
Même si tout écrivain décédé a tôt fait de disparaître des catalogues éditoriaux (double peine, donc), relisons Ruth Rendell.
Ruth RENDELL: Le Pasteur détective ("A New Lease Of Death" - 1967) - Le Masque n° 1521 - 1978 Texte français de Marie Louise Navarro.
Biblio exhaustive et détaillée de Ruth Rendell ici: https://fr.wikipedia.org/wiki/Ruth_Rendell
Bonne lecture
Serge 31*