Empathie avec May
Chez ma libraire, mon choix s’est porté sur le dernier roman de Peter May, sorti en février 2020 (trop tard pour avoir trouvé son public). Bien m’en a pris. Je me suis régalé.
L’histoire en quelques mots : à la pointe sud de l’Espagne, tout près du rocher de Gibraltar, Cristina Sanchez Pradell, femme flic pas très bien intégrée dans l’atmosphère macho de son commissariat accepte de remplacer un collègue pour se rendre avec Matias, autre policier de service, cette nuit-là, chez une victime potentielle de cambriolage. Sauf que le riche propriétaire est dans sa maison. C’est un baron de la drogue, armé… et quand Cristina crie « Police ! », la lumière s’allume brutalement. Ian Templeton (alias Jack Cleland) se retourne et fait instinctivement feu, tuant sa compagne. Il est arrêté mais affirme à la jeune policière que c’est de sa faute et qu’il n’aura de cesse de lui faire payer chèrement son crime.
Parallèlement, Mackenzie, flic écossais, homme droit qui s’attire beaucoup d’inimitiés du fait de sa totale franchise, travaille désormais à la National Crime Agency de Londres. Il se voit confier comme première mission d’aller récupérer Jack Cleland en Espagne (il maîtrise parfaitement l’espagnol -et l’arabe) et de le ramener en 24 h à Londres. Mackenzie a des rapports difficiles avec sa femme qui l’a mis à la porte. Il a deux enfants et entretient des relations privilégiées avec sa fillette, la seule qui lui porte encore de l’estime. Cette mission ne l’arrange pas car sa fille doit jouer le soir même pour la fête de l’école le soir même. Il lui avait promis d'être là...
Voilà, la situation, les personnages. Bien sûr tout cela va déraper ! Pendant son transfert vers l’aéroport où Mackenzie doit l’attendre pour le convoyage, Jack Cleland s’échappe avec une seule idée dans sa tête malade : se venger de celle qu’il tient pour responsable de la mort de sa compagne.
D’un côté un véritable génie du mal, de l’autre une famille menacée par un dément. Le tourne-pages est bien installé et le déroulement de l’intrigue est mené de main de maître. Le duo hispano-anglais fonctionne bien. L’auteur nous fait découvrir une Costa del Sol méconnue et le rocher ne sera le cadre de l’action qu’à la toute fin.
Mais il y a un plus ! Les personnages secondaires, leurs relations familiales et surtout l’un d’entre eux, très attachant : Ana, sœur de Cristina et tante de Lucas, son fils menacé en premier. Un jour, Ana, bien qu’en partie sourde, a vu et entendu. Elle est peu à peu devenue totalement sourde et aveugle.
On peut aisément imaginer le plaisir que prendra le méchant pour investir sa vie et jouir de sa souffrance. Même s'il l'apprécie peu à peu, il reste obnubilé par sa folie de vengeance
Magnifique personnage ! on sent que l’auteur a une véritable empathie avec ses créatures.
Un roman psychologique mais pas que, un thriller mais avec un plus.
Un vrai coup de ♥
Rendez- vous à Gibraltar, Peter May, Rouergue Noir, traduit de l’anglais par Ariane Bataille.