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Publié par blog813

...les yeux dans les yeux...

  Interview donnée à Jean-Jacques Bourdin sur BFM TV le 8 février 2013

  C’est moi qui dis la vérité.  

  JJ B :       Les yeux dans les yeux, avez-vous eu un compte en Suisse ou pas ?

  Les yeux dans les yeux, je n’ai pas, je n’ai jamais eu de compte en Suisse

 JJB :         À aucun moment ?

   À aucun moment, et la réponse apportée par les autorités françaises par la Suisse permettra, je l'espère, et très vite, et le plus vite serait le mieux, d'en finir avec ces saletés.

Ceux qui sont nés avant 2000 se souviendront certainement de cette célèbre affaire, ce scandale politico-financier dans un gouvernement qui, au sortir des années Sarkozy, se voulait propre. C’est Jérôme Cahuzac, ministre du budget de François Hollande, qui est interviewé. Et les saletés dont il parle, ce sont les accusations qu’Edwy Plenel, directeur de la publication du journal d’informations numériques Médiapart a lancées contre lui, le 4 décembre 2012. Le ministre a eu un compte en Suisse qu’il a fermé pour transférer des millions d’euros dans un paradis fiscal. Le 5 décembre, Mediapart met en ligne un enregistrement, présenté comme un échange entre Jérôme Cahuzac et Hervé Dreyfus, son gestionnaire de fortune en 2000, qui corrobore les informations publiées.

C’est sur cette affaire que François Médéline a fondé le récit de La résistance des matériaux, paru en janvier 2024 à la Manufacture de livres.

Bien sûr, il change le nom des principaux acteurs : Cahuzac devient Serge Ruggieri, Dreyfus devient Jean-Michel Garand (chef de cabinet du ministre) marié à la députée du Rhône, beurette de service, Djamila Garand-Boushaki. Ajoutons à cela un flic borderline de la brigade financière, le commandant Alain Dubak. Un ignoble, Gérald Hébert, père de deux garçons qu’il affectionne, membre de la DST et prêt à toutes les saloperies, jusqu’à l’assassinat pour sauver les intérêts d’un magnat. Enfin, Arfi, journaliste à Mediapart qui ne lâchera jamais sa proie. Les autres actants sont connus et nommés : Président de la République, Jean-Marc Ayrault, premier ministre, Stéphane Le Foll, Sarkozy, Hortefeux, Plenel et toute une gamme d’hommes politiques de divers partis.

Comme dans les romans historiques, personnages fictifs et réels sont confondus. Un effet de réel augmenté de comptes-rendus presse, gros titres, transcriptions de conversations téléphoniques captées par la CIA. Mais l’histoire reste (presque) la même. Ruggieri a  fraudé, il a détourné de l’argent, l’a planqué dans un pays voisin, l’a fait sortir ensuite pour le placer dans un paradis fiscal et Plenel a joué son rôle de lanceur d’alerte. Avec l'aide d'Arfi, il a épinglé le fraudeur sur lequel il s’est acharné jusqu’à ce qu’il finisse par avouer et se voie condamné pour blanchiment de fraude fiscale.

Et finalement, alors qu’on connaît déjà la fin, on se laisse prendre à l’histoire, construite comme un roman d’espionnage. On dévore les 489 pages. On s’intéresse aux personnages secondaires fictifs. On suit la progression du mensonge et de l’attaque acharnée de Mediapart jusqu’à l’inévitable fin. Tout en se demandant comment Djamila va s’en sortir... Bref, un réel suspens.

Mais ce qui rend surtout le roman haletant, c’est le style. François Médéline procède par phrases ultracourtes qui donnent un rythme total à son texte, seulement interrompues par les passages en italique. Surtout constitués de dialogues téléphoniques ou de gros titres. : enregistrements de conversations, titres des journaux, documents réels ( ?).

Phrases nominales, sujet-verbe-complément. Un complément circonstanciel, rarement plus, voire un adverbe. Anaphores. Répétitions. Un exemple, p 438 :

— Le 6 h 48.

Dans la berline. Pascal n'est pas d'humeur. Djamila n'est pas d'humeur non plus.

La journée à la Région se remplit de réunions. La journée à la Région se remplit de signatures. La journée à la Région se remplit de palabres.

Djamila reçoit un SMS de son mari. C'est le troisième message de la journée. Djamila ne le lit pas.

Dans la berline. Pascal n'est toujours pas d'humeur. Djamila n'est pas d'humeur non plus.

Djamila fume une cigarette. Pascal fume une cigarette. Djamila glisse une main sous sa veste.

C'est étrange — c'est puissant — c'est merveilleux.

Djamila se pince. Djamila ne rêve pas. C'est sûr et certain : le bébé a bougé.

Le bébé a bougé, le bébé a bougé ! Putain, le bébé a bougé!

Pascal dépose Djamila place Carnot et Mila veut que ça recommence.

Mila ne le sait pas vraiment. Mila ne le désire pas vraiment. Ça vient de l'intérieur. Ça vient de l'extérieur. Ça vient de nulle part.

C'est la foi — c'est une expansion. Mila ne sera plus jamais seule.

Mila rit et Djamila essuie ses larmes.

Il épingle aussi, au passage, d’une formule assassine, Emmanuel Macron, « Le secrétaire général adjoint met son grain de sel partout. Il sort de la banque Rothschild et se pense omniscient. C'est un connard arrogant avec les dents du bonheur. Il s’appelle Emmanuel Macron. » François Hollande « personne ne comprend Hollande [...] comment  a-t-il pu devenir président de la République ? » « Flamby » Aussi, quelques autres personnalités politiques : Sarkozy, Guéant, Strauss Khan...

Le roman est composé en quatre parties : Explosion, Collusion, Diversion, Expédition

 

Loi fondamentale de la résistance des matériaux dite « loi de Hooke »

La variation de longueur d’un ressort appelée Δ l est proportionnelle à la force de traction ou de compression appelée F.

Soit F = -k Δ l (k étant la raideur du dit ressort)

Finalement, le ressort Ruggieri n’a pas résisté à la force de traction Plenel-Arfi. Et c’est tant mieux. Bravo !

Le Facteur 813

 

  

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D
Un roman compliqué mais passionnant. Quatre parties en effet : Explosion, Collusion, Diversion, Expédition. J'ai sorti (pas complètement au hasard ) un livre , j'ai lu la page 438 : "Il marchait en zigzag. Il agitait le sac de jetons. Il se planta face aux gamins et tituba, plein comme une barrique. Les mômes l’acclamèrent. Les mômes scandèrent « Son-ny ! » Quelques profs paumés observaient la scène.<br /> Les mômes hurlèrent. Les mômes martelèrent leurs sièges. Les profs ravalèrent leur salive. Sonny sourit. Sonny tituba. Sonny dit : — Du calme !<br /> Les mômes hurlèrent. Sonny tituba. Sonny hurla :<br /> — Vos gueules, bande de petits branleurs !<br /> Les mômes s’écrasèrent. Les profs firent la gueule. Sonny fit une leçon de morale.<br /> — Travaillez bien. Apprenez vos leçons. Ne volez pas d’alcool dans les magasins. Ne vous avouez jamais battus. Allez à l’église. Utilisez des capotes de la marque Sheik. Venez me voir foutre une branlée à Cassius Clay. Je vais le renvoyer à La Mecque à coups de pied au cul, ce petit con de musulman.<br /> Sonny s’arrêta. Sonny salua. Sonny sortit une flasque. Les mômes l’acclamèrent. Les profs applaudirent du bout des doigts." Ce roman pas complètement choisi au hasard compte six parties nommées : Extradition, Extorsion, Subversion, Coercition, Incursion, Interdiction. Ce roman est intitulé "American Death Trip" de James Ellroy. <br /> Il y a un peu de James Ellroy dans "La résistance des matériaux" de François Médéline.<br /> <br /> Gilles Deboisse - Adhérent n° 802
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B
Merci Gilles, c'est une réflexion intéressante. Il y a certainement une inspiration mais Ellroy [A Mon Humble Avis] a cessé de faire des recherches stylistiques. Ce qui avait été le cas dans la première partie de son écriture, chaque roman était une révolution par rapport au précédent. <br /> Que François Médéline soit admiratif d'Ellroy est une bonne chose et il est vrai que ce roman tient énormément par son style. À partir d'un scandale ultra connu, il tisse une œuvre originale.<br /> <br />